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Il n’y eut pas d’enquête véritable, et David fut très peu importuné. L’affaire Matsumaki demeura une énigme. Tous les documents saisis dans l’appartement se révélèrent authentiques. Comme l’avait supposé Emmy, ils appartenaient à quelqu’un dont on ne retrouva pas la trace. Les empreintes digitales du mort avaient été envoyées au FBI ; si on les identifia comme celles de Marvin Orroway, le LAPD n’en sut jamais rien car le dossier lui fut aussitôt retiré.
On ne put rien reprocher à David Sarella puisque dix personnes aux éditions du Chat Hurlant affirmèrent sous serment qu’à l’heure du meurtre l’auteur en question était en train de se faire injurier par son directeur de collection, Bert Sweeton, au siège de la maison, à trente kilomètres de la scène du crime.
On vida le loft du rez-de-chaussée. Les cerfs-volants furent dispersés, David recueillit le chat noir.
Trois semaines plus tard, il reçut une lettre anonyme postée à Chicago, le pays des abattoirs.
Deux lignes tapées à la machine rayaient la feuille de papier :
Ça m’a semblé la meilleure solution. Mais vous resterez toujours un dégonflé. Lisez, apprenez, détruisez, comme on dit dans les romans de gare.
Il songea qu’il n’entendrait sans doute plus jamais parler d’Emmy Fielding.
Il acheta un nouveau Bright Flood Shadow, fit restaurer son carnet à couverture de caoutchouc. Le chat sur la banquette arrière, il prit la route du Lassen National Volcanic Park. Il avait prévenu Ursula Pooshkie de son arrivée, et la vieille dame avait battu des mains comme une cheerleader à la fin d’un match victorieux.
Pendant qu’il roulait, il lui arriva à plusieurs reprises de regarder le chat qui ronronnait, roulé en boule sur une vieille couverture mexicaine. Le micro espion pendait toujours à son collier de cuir, petite médaille accrochant les reflets du soleil.
— Hé ! dit tout à coup David à voix haute. Orroway, tu m’entends ?